Des fois, ça marche sur le pilote automatique.
Même si des fois, d'autres pensent qu'un parent ça chiâle pour rien.
Parce que, dans une journée, un parent, en plus d'être un professionnel, de «rocker» le tailleur/la jupe/les pantalons/la chemise/le t-shirt, bin ça fait à manger pleins de fois.
Et pour chacune de ces fois-là, ça se demande pendant une heure ce que ça préparera.
Faut que ça soit bon, attrayant, al denté, santé, coloré.
Qu'il y ait des légumes mais qui paraissent pas trop mais de toute façon c'est juste de la déco, de la viande coupée trop petit parce que sinon il ne l'avaleront pas et des féculents en portion raisonnable et baigné dans la sauce sans sel, sans gras, sans rien, sans culpabilité.
Et après l'avoir fait, faut servir tout le monde, oublier les fourchettes, manquer de place sur le comptoir, renverser le jus, marcher sur une saucisse, encore manquer le riz, faire chauffer les purées à coup de 4 secondes, passer tout droit et faire refroidir les purées, manger, faire manger le bébé, insister et répéter et re-insister pour que les autres enfants mangent envoye encore deux bouchées, juste deux bouchées après c'est fini, j't'en suppliiiiie!
Et après ça faut débarbouiller tout le monde. Deux ou trois fois pour le bébé qui a encore réussit à se frotter les yeux avec des courges. Et frotter les maudits racoins pas possibles de la chaise haute maudit pourquoi on a acheté ça, et courir après le plus vieux, vite avant qu'il touche au divan avec ses mains pleines de yogourt.
Et aussi, à part de ça faut penser aux pipis de tout le monde.
Et faut pas en manquer un sinon faut c'est la catastrophe.
Quand ça arrive faut regarder le plancher d'un certain angle au soleil pour être sûr qu'on a trouvé toutes les gouttes perdues en chemin, maudit p'tit poucet j'aimais mieux quand il semait du pain.
Et là le parent y dit «tention bouge pas tu vas en mettre partout»!
Et c'est le défi de : enlève les pantalons et les bobettes et les bas sans y toucher ah maudit trop tard j'y ai touché faut j'essaie de pas le beurrer plus qu'il l'est, bin voyons le chat viens de licher le dégât c'est tu dangereux?
La palme du compliqué c'est de sortir le groupe dehors.
Un parent ça prévoit ça une semaine à l'avance, mentalement.
Parce que là, faut remplir le sac à dos, le sac à couches, préparer un lait, une bouteille d'eau, des shorts au cas où et une couverte si y fait frais pour pas se dire ah non j'aurais du penser à apporter une couverte y fait frais.
Faut crémer les individus de leur crème respective et vérifier quatre fois si on s'est pas trompé et surtout pas oublier les oreilles sinon on va être un bien mauvais parent fatigué si les enfants finissent la journée avec les oreilles rouges soleil.
Sans compter qu'à tout bout de champ faut les attraper ces enfants-là.
Faut les attraper pour mettre les shorts, les attraper pour mettre un chandail, les ré-attraper pour mettre des bas, puis pour chacun des souliers pleins de sable qu'ils vident dans le salon parce que c'est tannant marcher dans une tasse de sable.
Puis prendre le bébé dans sa coquille qui pèse 76 livres, d'une main, puis la sacoche, puis le sac à couches et tenir la main des autres enfants pendant que de l'autre bord on essaie de tenir la poussette qui pèse, elle, 145 livres mouillée, et ouvrir la porte, coincer dans le cadre de porte, barrer la porte ah pis d'la m... je la fermerai une autre fois de toute façon le sac à couches est pris dans la poignée eh maudit j'suis priiiiiiis!
Maman j'ai envie de pipi!
Mais le top des facteurs de cernes de parents,
ce qui fait qu'ils viennent avec le coeur tout ratatiné et le rouge aux yeux de temps en temps,
et qui fait que l'infâme boule noire de Paul Houde vient se loger dans leur bedon de parents,
ce qui les fatigue et les épuise le plus,
c'est les petites, les moyennes et les grandes inquiétude qu'ils vivent dans une minute.
Un parent c'est toujours inquiet et ça lui twiste le dedans souvent.
Un parent, c'est inquiet le matin parce qu'ils dorment trop longtemps, le midi parce qu'ils mangent pas leurs légumes, dehors parce qu'ils brakent juste avant la rue, au souper parce qu'ils avalent un cheerios de travers, à l'heure du bain parce qu'on entend tellement d'histoires de bébés jetés avec l'eau du bain, le soir en les couchant parce qu'ils se demandent s'ils vont avoir froid à 22h, et à minuit, et à trois heures.
Ah seigneur le bébé commence la garderie dans une semaine je survivrai pas.
Un parent c'est fatigué,
c'est tout poché.
Un beau ramassis des plus belles choses de la vie, bien compactées sous leurs yeux.
Tantôt rougis, tantôt humides, tantôt un peu fâchés, mais pas vraiment mais faut en avoir l'air sinon ça chicane mal.
Des yeux de parents c'est cerné, mais c'est pleins de surveillance, de bienveillance, de reproches, de calins et surtout de tout l'amour du monde pour leurs prunelles.